Nos associations expriment leur inquiétude quant à la situation des mineurs placés dans des Centres d’orientation pour mineurs isolés (CAOMI) créés à la suite du démantèlement du bidonville de Calais. Il est primordial de protéger ces enfants rendus particulièrement vulnérables par leur parcours et leurs conditions de vie en France
Communiqué interassociatif
Nos associations ont, dans une lettre remise au Président de la République à l’occasion du 20 novembre, formulé des inquiétudes quant à la situation des mineurs placés dans des Centres d’orientation pour mineurs isolés (CAOMI) créés à la suite du démantèlement du bidonville de Calais.
Ces préoccupations ont été explicitées au cours d’une réunion organisée le 14 décembre à l’Elysée en présence des ministères concernés ; elles rejoignent sur de nombreux points les conclusions du rapport du Défenseur des Droits rendu public ce 20 décembre : le système mis en place en dehors du droit commun pour répondre à l’urgence ne doit en aucun cas éloigner ces enfants en danger de leur prise en charge dans le système français de la protection de l’enfance dont l’objectif est de répondre à toutes les situations d’enfants en danger, sans distinction de nationalité, de situation administrative, de présence ou non des parents. Nos inquiétudes n’ont fait que croître avec l’annonce récente des décisions du Home Office Britannique qui laisse présager que la grande majorité des jeunes en CAOMI ne pourront réaliser leur projet d’être accueillis au Royaume Uni, ce qui les fragilisera encore davantage.
Il est aujourd’hui impératif de sortir du système dérogatoire des CAOMI, prévu pour 3 mois, et que les autorités françaises s’assurent notamment :
- que chaque mineur bénéficie, indépendamment des motifs de refus du Home Office et de la procédure d’examen pour l’accueil en Irlande, d’une mise à l’abri selon les normes de la protection de l’enfance en vue d’une admission à l’aide sociale à l’enfance; ceci nécessite que soient mobilisés par les départements concernés les moyens pluridisciplinaires nécessaires (travailleurs sociaux connaissant les routes de la migration, interprètes, psychologues, juristes,…), en particulier pour repérer les enfants qui pourraient être victimes de réseaux de traite et pour que soient pris en compte les traumatismes subis durant leur parcours et leur passage dans le bidonville de Calais ;
- que chaque décision (du Home Office, du Conseil Départemental, de l’Office Français de Protection des réfugiés et apatrides) soit motivée et notifiée au jeune de manière individuelle, écrite, dans une langue et un langage qu’il comprend ;
- que chaque décision soit assortie d’une information écrite, compréhensible quant aux démarches administratives ou judiciaires pour contester ces décisions ; nos associations insistent notamment sur la possibilité de saisir le juge des enfants en cas de refus de prise en charge par un Conseil Départemental (article 375 du code civil)
- que soit rendu effectif l’accès à l’ensemble des dispositifs permettant la représentation juridique et légale des mineurs (droit à l’avocat, désignation d’un administrateur ad Hoc ou d’un tuteur), étant entendu que cela nécessite de s’assurer des compétences des professionnels ainsi nommés ;
- que l’accès aux soins et à l’éducation soit mis en oeuvre sans délai, comme l’exige le respect des droits fondamentaux et notre législation ;
- que les cas de disparitions des CAOMI, les mineurs concernés fassent l’objet d’un signalement comme pour tout autre enfant relevant de la protection de l’enfance ;
- que ces mesures s’appliquent également aux mineurs qui ont pu être orientés vers des Centres d’Accueil et d’Orientation destinés aux majeurs ;
L’urgence humanitaire invoquée pour mettre fin à la « Jungle » de Calais semble dépassée ; il est primordial de protéger ces enfants rendus particulièrement vulnérables par leur parcours et leurs conditions de vie en France. La notification des décisions les concernant, ainsi que les possibilités des recours doivent être traitées avec la plus grande attention afin de prévenir des ruptures d’accueil, des fugues, qui remettraient ces jeunes sur la voie de l’errance, les exposant à de nouveaux dangers.
Nous demandons donc au gouvernement et aux départements d’apporter des garanties quant à l’effectivité, dans ce contexte exceptionnel, de l’accès au droit commun de la protection de l’enfance pour ces enfants et adolescents.
Signataires :
Agir Ensemble pour le Doits des Enfants (AEDE) – L’Auberge des Migrants – La CIMADE – DEI France – ECPAT France – Emmaüs France – Hors la Rue – Secours Catholique Caritas France – SOS Villages d’Enfants – Themis – UNAPP – UNICEF France – Utopia 56 – La Voix de l’Enfant
Photo : Alex Bonnemaison