Alors que la situation à Calais est devenu explosive, plusieurs associations de solidarité, dont Emmaüs France, écrivent à Manuel Valls.
Monsieur le Premier Ministre,
Moins de deux mois après le déplacement des réfugiés sur le terrain mis à disposition par la Ville de Calais et la Région, et après l’ouverture complète du centre Jules Ferry, la situation à Calais est devenue explosive. C’est un véritable scandale humanitaire.
– Le nombre de réfugiés présents à Calais se situe maintenant aux environs de 3000 personnes, et ce chiffre va probablement augmenter encore de façon sensible dans les semaines qui viennent. Les expulsions menées mardi 2 juin à Paris comme à Calais ont ajouté aux tensions existantes et provoquent des arrivées supplémentaires sur le bidonville.
– Les capacités du centre Jules Ferry sont dépassées : plus de 2000 repas sont servis chaque jour alors que la plateforme est prévue pour 1500 personnes.
– Environ 120 femmes et enfants survivent dans la « jungle », et avec eux de nombreux mineurs isolés, en raison de la saturation du dispositif d’hébergement de Jules Ferry et des dispositifs dédiés aux mineurs. Ceci nous inquiète particulièrement, étant donné les violences faites aux femmes sur le bidonville. Elles doivent être protégées de toute urgence.
– Les conditions de vie sur le terrain sont déplorables : pas de toilettes, des excréments partout, pas d’éclairage, pas de poubelles ni de sacs-poubelle (une seule benne est mise à disposition et les déchets s’amoncellent). Les nouveaux arrivants n’ont souvent pas d’abri pendant plusieurs jours et manquent de couvertures. Les aménagements promis à diverses reprises ne sont toujours pas concrétisés.
– L’entassement sur un même site, la longueur des files d’attente, l’exaspération et la fatigue liées aux difficultés du passage en Grande Bretagne et aux conditions de vie, l’alcool, la faim, l’éloignement des commerces et des services (OFII, sous-préfecture, postes, PASS…), tous ces éléments créent des tensions qui peuvent déboucher sur des bagarres. La rixe survenue dans la nuit de dimanche 31 mai à lundi 1er juin, qui a laissé plus de 200 personnes sans abri à la suite de l’incendie de leurs cabanes ou tentes, en est un triste exemple.
Aujourd’hui, nous souhaitons vous interpeller avec force et vous indiquons que les associations ne peuvent continuer à intervenir dans ces conditions à Calais si un certain nombre de mesures ne sont pas prises en toute urgence :
– mobilisation de tous les moyens nécessaires pour améliorer sans délai les conditions de vie sur le terrain dans le respect des normes internationales et comme les autorités préfectorales s’y sont engagées à plusieurs reprises : véritable accès à l’eau, à des toilettes, à un éclairage public et à un dispositif de sécurité facilitant l’intervention des secours.
– mise en place de moyens nouveaux pour protéger et héberger les femmes, les enfants et les mineurs isolés.
– concertation rapide en vue de la création d’un autre site d’accueil dans le Calaisis pour limiter la concentration et les tensions dans et autour du Centre Jules Ferry, ainsi que sur l’implantation de centres de même type sur le territoire national.
Pour évoquer avec vous l’urgente nécessité de mettre en œuvre, nous vous demandons, Monsieur le Premier Ministre, de bien vouloir nous recevoir dans les meilleurs délais,
Dans cette attente, nous vous prions de recevoir, l’expression de nos salutations fatiguées, désespérées mais néanmoins respectueuses.
Associations signataires : Emmaüs France, la Cimade, Médecins du Monde, Secours Catholique, l’Auberge des migrants, Salam Nord-Pas-de-Calais et Calais, Ouverture Humanité.
Téléchargez la lettre au Premier ministre : 2015 06 03 – Courrier Premier ministre – 4 juin 2015