Emmaüs France et la FNARS interpellent l’Etat pour que les structures de l’insertion par l’activité économique (IAE) disposent des moyens de formation des salariés, et d’implication dans le développement économique et social des territoires que justifient leurs compétences.
Pour Coorace, Emmaüs France et la FNARS, la réforme de l’IAE lancée en 2014 devait servir un objectif : inscrire pleinement les structures d’insertion par l’activité économique dans les politiques de développement du territoire.
Pour une vision globale de l’IAE
Les près de 4 000 structures d’insertion par l’activité économique salarient chaque année plus de 130 000 personnes éloignées de l’emploi et leur permettent de travailler, avec un encadrement et une exigence de rentabilité raisonnable, pour retrouver les repères du travail, découvrir des métiers et acquérir des compétences. Elles leur proposent en parallèle un accompagnement social et professionnel et organisent des parcours de formation. Elles offrent donc un emploi tout de suite à des personnes qui n’en auraient pas autrement, et des possibilités d’en occuper un durablement ensuite, chez un employeur classique.
Mais elles font plus que cela. Elles fournissent en effet des solutions en ressources humaines aux entreprises mais aussi des biens et des services, très souvent d’utilité sociale, aux habitants. Une structure de l’IAE n’est donc pas qu’un outil d’accès à l’emploi. C’est un acteur générant des richesses économiques et sociales et apportant une capacité d’innovation indispensable pour que se déploie un développement local plus solidaire, améliorant les conditions de vie des habitants et la cohésion sociale.
Elles doivent en conséquence être reconnues à ce titre et pouvoir être soutenues dans toutes ces dimensions, pour mettre leurs compétences au service du territoire.
Tout en poursuivant leur investissement dans le suivi de la réforme du secteur (avec des avancées positives sur la durée des parcours des salariés en insertion par exemple), les trois réseaux se sont mobilisés fortement pour que cet objectif ne soit pas oublié dans les impératifs de gestion du nouveau cadre de financement des structures.
De la formation aux capacités d’innovation
Tout d’abord, les réseaux ont rappelé le gâchis que constituait l’incapacité des structures à accompagner la formation des salariés en insertion. Si des avancées positives ont pu être données par Pôle emploi ou les partenaires sociaux suite aux précédentes interpellations conduites sur ce sujet, elles ne se sont pas réellement traduites sur le terrain. Alors que l’enjeu de formation des personnes éloignées de l’emploi est partagé par tous, et que la capacité des structures de l’IAE à donner du sens et de la qualité à un parcours de formation est également connue, les structures n’ont donc toujours pas les moyens d’agir.
Ils ont ensuite pointé l’éviction d’une large part des structures IAE, et plus largement de l’économie sociale et solidaire, des financements de l’innovation et du développement économique. Une éviction qui renvoie les structures vers le financement de leur mission d’insertion, par l’Etat ou le département, ou vers des fondations, pour permettre le renouvellement de leur outil de production, l’étude de nouvelles activités ou la création de partenariats. Une éviction qui les enferme dans la seule sphère de l’insertion, les empêchant de pouvoir développer leurs projets sociaux.
Enfin, les trois organisations ont rappelé la nécessité que les services déconcentrés de l’Etat accordent plus de confiance aux acteurs et s’appuient sur le dialogue de gestion pour évaluer a posteriori l’action des structures plutôt que de multiplier, comme cela se fait parfois, les interdictions a priori. Dans trop de territoires, les ateliers et chantiers d’insertion (ACI) ne peuvent proposer aux salariés en insertion, comme la loi les y autorise pourtant, des horaires de travail allant de quelques heures à 35 heures, des contrats allant jusqu’à 24 mois ; ils ne peuvent pas toujours non plus développer leur activité économique, contraints par des interprétations excessivement prudentes de la notion de concurrence déloyale ou des limites du taux d’autofinancement.
Des premières réponses, en attendant d’autres
Les échanges répétés et positifs en Conseil national de l’IAE et avec Carine Chevrier, déléguée générale à l’emploi et à la formation professionnelle, appuyés par un courrier inter-réseaux aux ministres Myriam El Khomri et Clotilde Valter, ont permis de dégager des axes de travail.
Concernant la formation, Pôle emploi devrait prochainement valider le principe de prendre en charge des formations pour les salariés en insertion dans le cadre du plan « 500 000 formations supplémentaires » annoncé par François Hollande en janvier 2016, et clarifier plus globalement et par écrit les modalités de prise en charge de formation pour les salariés en insertion, y compris dans le cadre du compte personnel de formation.
La DGEFP va s’adresser aux Directions régionales des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi (DIRECCTE) par écrit pour appeler à plus de souplesse dans leur appréciation des pratiques des SIAE. Elle souhaite également travailler avec ses services en charge de l’accompagnement des mutations économiques à coopérer plus étroitement avec les services en charge de l’insertion, afin que les SIAE soient pleinement repérées, et potentiellement financées, au titre de la gestion territoriale de l’emploi et des compétences ou de la revitalisation des territoires.
Enfin, un état des lieux des dispositifs de financement de l’innovation sera dressé, avec la direction générale de l’entreprise notamment, pour identifier les outils auxquels pourraient accéder les SIAE.
Pour favoriser le déploiement de réponses rapides mais aussi augmenter le nombre de postes d’insertion et lutter contre la tendance à la hausse du coût du travail dans l’IAE, FNARS, Emmaüs et Coorace ont depuis saisi par courrier Myriam El Khomri et Emmanuel Macron.
La FNARS et Emmaüs ont aussi valorisé l’IAE dans leur contribution commune aux travaux de France Stratégie pour l’accès à l’emploi sur la période 2017-2027, toujours dans le souci de faire connaître la richesse de ce secteur, et sa capacité à apporter de réelles réponses aux besoins sociaux de nos territoires.
Le diagnostic étant partagé, les réseaux agiront pour que des avancées concrètes se produisent dès le second semestre 2016.