Donnez une seconde vie aux objets Où donner ? Où acheter ?

Actualité / Plaidoyer

Black Friday 2024 : mais où est donc passée la loi anti « fast-fashion » ?

Black Friday 2024 : mais où est donc passée la loi anti « fast-fashion » ?

Huit mois après son vote à l’Assemblée Nationale, la loi de régulation de la fast-fashion n’est toujours pas inscrite à l’agenda du Sénat. À l’occasion du Black Friday, les organisations réunies au sein de la coalition Stop Fast-Fashion interpellent les Sénateurs et Sénatrices sur l’importance de son vote, dans son intégrité et le plus rapidement possible.

La tribune publiée dans Libération

Derrière le coup marketing se cachent de nombreux abus sociaux et environnementaux. Depuis huit mois et le passage de la loi encadrant les pratiques de la mode jetable à l’Assemblée nationale, plus de deux milliards de vêtements qui ont été produits et consommés sans régulation. Sénateurs, Sénatrices, qu’attendez-vous ?

Votée à l’unanimité au mois de mars 2024, la loi encadrant les pratiques de fast-fashion devait passer au Sénat en procédure accélérée quelques semaines plus tard. Huit mois après et alors que le Black Friday marque une énième journée de consommation à outrance, des associations du collectif Stop Fast-Fashion et des organisations de l’Economie sociale et solidaire s’indignent du silence du Sénat.

Phénomène états-unien, le Black Friday est une journée de promotions qui s’exporte en France depuis quelques années. Déjà excessivement peu chers, les vêtements se retrouvent bradés à des prix dérisoires. Ainsi, 15 millions d’articles de mode seront vendus en moins de trois jours en France. Pourtant, derrière ce coup marketing se cachent de nombreux abus sociaux et environnementaux d’un secteur à la dérive.

Produire et vendre toujours plus de vêtements à prix cassés n’est possible que par l’exploitation des travailleurs et travailleuses. Seulement 2 % des personnes employées dans l’industrie textile perçoivent un salaire vital. Au Bangladesh, deuxième pays exportateur de vêtement après la Chine, et dont 85 % de la production est consacrée à la fast fashion, le salaire est presque deux fois inférieur à celui nécessaire pour vivre dignement et sortir de l’indigence. Les personnes qui s’organisent pour réclamer de meilleures conditions de travail sont réprimées dans la violence. En parallèle, le fait de sous-payer drastiquement les employé·es à l’autre bout du monde rend très difficile le redéveloppement d’une industrie textile française.

La course à la surproduction et à la surconsommation a également un impact dramatique sur la planète. Alors que 67 % des fibres utilisées dans nos vêtements proviennent aujourd’hui d’énergie fossile, le secteur, déjà responsable de 10 % des émissions de CO2 mondiales, prend un virage à contresens de la transition climatique. Boostées par le modèle de fast-fashion, aujourd’hui à son paroxysme, les entreprises encouragent une roue infernale du toujours plus, toujours moins cher, toujours plus vite, avec des envois de vêtements par avion désormais. Pendant ce temps, les bennes de collecte débordent et les associations ne savent plus quoi faire des textiles jetés. Les vêtements de la fast-fashion ont une espérance de vie très faible, sont rendus rapidement obsolètes par des stratégies invasives de marketing et sont difficilement exploitables en seconde vie.

Dans ce secteur aux multiples crises, il apparaît essentiel de remettre un cadre. La proposition de loi de régulation de la fast-fashion votée à l’Assemblée nationale le 14 mars 2024, bien que dépourvue de critères sur les droits humains, définit et pénalise les pratiques de la fast-fashion et constitue ainsi une première étape indispensable dans la lutte contre la surproduction textile. Il est essentiel qu’elle soit votée dans son intégrité, sans être vidée de son contenu et le plus rapidement possible. Pourtant, elle n’est toujours pas inscrite à l’agenda du Sénat.

En France, l’année dernière, trois milliards de vêtements ont été vendus, une écrasante majorité en provenance de marques de la fast-fashion. Depuis huit mois et le passage de la loi à l’Assemblée nationale, c’est donc plus de deux milliards de vêtements qui ont été produits et consommés sans aucune régulation. Sénateurs, Sénatrices, qu’attendez-vous ?

Alors que la France pourrait être pionnière dans l’encadrement des pratiques de la mode jetable, il faut avoir le courage de dire stop à la fast-fashion pour créer la seule tendance viable : celle d’une mode éthique et durable.

Signataires :